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voyageur, qui offre des particularités assez bizarres et peut-être inconnues des naturalistes. Il est à peu près de la grosseur d'une caille ; ses yeux, d'un noir brillant, sont entourés d'une magnifique auréole bleu de ciel ; tout son corps est de couleur cendrée et tachetée de noir ; ses jambes n'ont pas de plumes, elles sont garnies d'une espèce de poil long et rude, assez semblable à celui du daim musqué ; ses pattes n'ont nullement l'aspect de celles qu'on voit aux autres volatiles ; elles ressemblent absolument aux pattes des lézards verts, et sont recouvertes d'écailles d'une dureté à l'épreuve du couteau le plus tranchant. Ainsi, cet être bizarre tiendrait tout à la fois de l'oiseau, du quadrupède et du reptile ; les Chinois le nomment Pied-de-dragon (Loung-Kio). Ces oiseaux arrivent ordinairement par grandes troupes du côté du nord, surtout lorsqu'il est tombé une grande quantité de neige ; ils volent avec une rapidité étonnante, et le mouvement de leurs ailes fait entendre un bruit sonore, entrecoupé, et semblable à celui de la grêle. Pendant que nous étions chargés dans la Mongolie du nord, de la petite chrétienté de la Vallée-des-Eaux-Noires, un de nos chrétiens, habile chasseur nous apporta un jour deux de ces oiseaux encore tout vivants ; ils avaient le caractère excessivement farouche ; aussitôt qu'on approchait la main pour les toucher, le poil de leurs jambes se hérissait, et si on avait la témérité de les caresser, on recevait à l'instant de rudes et violents coups de bec. Il nous fut impossible de conserver longtemps ces Pied-de-dragon, tant ils avaient le caractère sauvage : ils ne touchaient à aucune des graines que nous leur présentions. Voyant qu'ils mourraient bientôt de