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nid de fauvette qu'il a longtemps cherché, du pêcheur qui voit frétiller, suspendu à sa ligne, un joli poisson ; et s'il était permis de rapprocher les petites choses des grandes, on pourrait encore comparer ce plaisir, à l'enthousiasme d'un Leverrier qui trouve une planète au bout de sa plume.

Quand notre sac était rempli d'argols, nous allions avec orgueil le vider à l'entrée de la tente ; puis on battait le briquet, on construisait le foyer, et pendant que le thé bouillonnait dans la marmite, on pétrissait la farine et on mettait cuire sous la cendre quelques petits gâteaux. Comme on voit, le repas était sobre et modeste, mais il était toujours d'une saveur exquise ; d'abord, parce que nous l'avions préparé nous-mêmes, et ensuite parce que toujours un appétit peu ordinaire en faisait l'assaisonnement.

Après le déjeûner, pendant que Samdadchiemba ramenait vers la tente les animaux dispersés à la recherche des bons pâturages, nous récitions une partie de notre bréviaire. Vers midi, nous nous permettions un peu de repos, quelques instants d'un sommeil doux, profond, et jamais interrompu par le cauchemar ou par les rêves pénibles. Ce délassement nous était nécessaire, parce que tous les soirs la veillée se prolongeait bien avant dans la nuit. Nous ne pouvions que difficilement nous arracher aux charmes de nos promenades, au clair de la lune, sur le bord des étangs. Pendant la journée, tout était calme et silencieux autour de nous ; mais aussitôt que les ombres de la nuit commençaient à se répandre dans le désert, la scène devenait aussitôt bruyante et animée ; les oiseaux aquatiques arrivaient par troupes innombrables, se répandaient sur les étangs voisins, et bientôt des milliers de voix rauques et stridentes