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Quand les affaires furent terminées, nous songeâmes au moyen de passer la nuit. Il ne fallait pas penser à aller chercher un asile dans ces cabanes de pêcheurs ; lors mome que le local eût été assez vaste, nous aurions eu une répugnance insurmontable à placer nos effets, pour ainsi dire, entre les mains de ces gens. Nous connaissions assez les Chinois, pour ne pas trop nous fier à leur probité. Nous cherchâmes donc à dresser quelque part notre tente. Mais nous eûmes beau tourner et retourner, partout, aux environs, il nous fut impossible de découvrir un emplacement suffisamment sec. La vase ou les eaux stagnantes recouvraient le sol presque sur tous les points. A une centaine de pas loin du rivage était un petit miao ou temple d idoles. On s'y rendait par un chemin étroit mais très-élevé. Nous y allâmes pour voir si nous ne pourrions pas y trouver un lieu de refuge. Tout était à souhait. Un portique, soutenu par trois colonnes en pierre, précédait la porte d'entrée, fermée avec un gros cadenas. Ce portique, construit en granit, s'élevait à quelques pieds au-dessus du sol, et on y montait à gauche, à droite et sur le devant, par cinq degrés. Nous décidâmes que nous y passerions la nuit. Samdadchiemba nous demanda si ce ne serait pas une superstition monstrueuse, d'aller dormir sur les marches d'un miao. Quand nous eûmes levé ses scrupules, il fit des réflexions philosophiques. Voilà, disait-il, un miao qui a été construit par les gens du pays, en l'honneur du Dieu du fleuve. Cependant quand il a plu dans le Thibet, le Pou-sa n'a pas le pouvoir de le préserver de l'inondation. Pourtant ce miao sert aujourd'hui à abriter deux Missionnaires de Jéhovah, et c'est la seule utilité qu'il aura