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base de leur nourriture journalière ; un cheval pour aller faire quelques courses dans le désert, et des moutons pour se régaler aux jours de fête.

En général, toutes les lamaseries ont des fondations, soit royales, soit impériales ; à certaines époques de l'année les revenus sont distribués aux Lamas, suivant le degré qu'ils ont atteint dans la hiérarchie. Ceux qui ont la réputation d'être savants médecins, ou habiles tireurs de bonne-aventure, ont souvent occasion de recueillir en outre d'excellentes aubaines ; cependant on les voit rarement devenir riches. Les Lamas, avec leur caractère enfantin et imprévoyant, ne savent pas user modérément des biens qui leur sont venus tout à coup ; ils dépensent l'argent avec autant de facilité qu'ils le gagnent. Tel Lama, qui, la veille, portait des habits sales et déchirés, rivalisera le lendemain par la richesse de ses vêtements, avec le luxe des plus hauts dignitaires de la lamaserie. Aussitôt qu'il a à sa disposition de l'argent ou des animaux, il court à la ville de commerce la plus rapprochée, s'habiller pompeusement de haut en bas ; mais il est toujours probable qu'il n'usera pas lui-même ces magnifiques habits. Après quelques mois, il s'acheminera de nouveau vers la station chinoise, non plus pour faire l'élégant dans les beaux magasins de soieries, mais pour déposer les robes jaunes au Mont-de-Piété ; et puis les Lamas ont beau avoir la volonté et l'espérance de retirer ce qu'ils portent au Tang-Pou, ils n'y réussissent presque jamais. Pour s'en convaincre, il n'est besoin que de parcourir les magasins de friperie dans les villes Tartaro-chinoises ; ils sont toujours encombrés d'objets lamaïques.