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pas rare de trouver des lances, des flèches, des débris d’instruments aratoires, et des urnes remplies de monnaies coréennes.

Vers le milieu du dix-septième siècle, les Chinois commencèrent à pénétrer dans ce pays. À cette époque il était encore magnifique ; les montagnes étaient couronnées de belles forêts, les tentes mongoles étaient disséminées çà et là dans le fond des vallées parmi de gras pâturages. Pour un prix très-modique, les Chinois obtinrent la permission de défricher le désert. Peu à peu la culture fit des progrès ; les Tartares furent obligés d’émigrer, et de pousser ailleurs leurs troupeaux. Dès lors le pays changea bientôt de face. Tous les arbres furent arrachés, les forêts disparurent du sommet des montagnes, les prairies furent incendiées, et les nouveaux cultivateurs se hâtèrent d’épuiser la fécondité de cette terre.

Maintenant ces contrées ont été presque entièrement envahies par les Chinois ; et c’est peut-être à leur système de dévastation, qu’on doit attribuer cette grande irrégularité des saisons qui désole ce malheureux pays. Les sécheresses y sont fréquentes, presque chaque année les vents du printemps dessèchent les terres. Le ciel prend un aspect sinistre, et les peuples effrayés sont dans l’attente de grandes calamités. Les vents redoublent de violence, et durent quelquefois jusque bien avant dans la saison de l’été. On voit alors la poussière s’élever par tourbillons au haut des airs ; l’atmosphère devient obscure et ténébreuse ; et souvent en plein midi on est environné des horreurs de la nuit, ou plutôt d’une obscurité épaisse, palpable, en quelque sorte, et mille fois plus affreuse que la nuit la plus sombre. Après