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de banque, qui représentent une valeur d'une somme de sapèques. Une once d'argent se vend ordinairement de dix-sept à dix-huit cents sapèques ; cela varie d'après la rareté ou l'abondance de l'argent qui est en circulation dans le pays.

Les changeurs ont une double manière de gagner dans leur commerce : s'ils donnent de l'argent un prix convenable, ils trompent sur le poids ; si leur balance et leur façon de peser sont conformes à la justice, ils diminuent pour lors le prix de l'argent. Mais quand ils ont affaire avec les Tartares, ils n'usent ordinairement ni de l'une ni de l'autre de ces deux manières de frauder ; au contraire, ils pèsent l'argent avec scrupule, et tâchent même de trouver un peu plus que le poids réel, puis ils le paient au-dessus du prix courant ; ils usent de ces moyens pour tromper plus efficacement les Tartares. Ils ont l'air de perdre au change, et ils y perdraient réellement, à ne considérer que le poids et la valeur de l'argent ; mais c'est sur le calcul qu'ils prennent leur revanche. En réduisant l'argent en sapèques, ils commettent des erreurs volontaires ; les Tartares, qui ne savent calculer que sur les grains de leur chapelet, étant incapables de découvrir la fourberie, sont obligés de prendre les comptes tels qu'on les leur fait. Ils sont toujours très-satisfaits de la vente de leur argent, parce qu'on le leur a bien pesé, et qu'ils en ont obtenu un prix avantageux.

Dans la maison de change de la Ville-Bleue où nous allâmes vendre notre argent, les changeurs chinois voulurent, selon leur habitude, user de cette dernière méthode, mais ils en furent dupes. Le poids qu'assignait leur balance é