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la chose paraisse facile, les succès sont pourtant très-rares. Combien qui s'exercent jour et nuit ! combien qui dorment l'arc entre les bras ! et cependant où sont ceux qui se sont rendus fameux ? Les noms proclamés dans les concours sont-ils nombreux ? Ayez le corps droit et ferme, évitez les postures vicieuses ; que vos épaules soient d'une immobilité inébranlable. Enfin fixez chaque flèche dans son but, et vous pourrez vous réputer habile. »

Le lendemain de notre arrivée à la ville militaire de Kou-Kou-Hote, nous en partîmes pour nous rendre à la ville marchande. Nous avions le cœur péniblement affecté, de nous être trouvés au sein d'une ville mantchoue, et de n'avoir entendu parler constamment que la langue chinoise. Nous ne pouvions nous faire à l'idée d'un peuple apostat de sa nationalité, d'un peuple conquérant que rien ne distingue maintenant du peuple conquis, si ce n'est peut-être un peu moins d'industrie, et un peu plus de vanité. Quand ce Lama thibétain promit au chef tartare la conquête de la Chine, et lui prédit qu'il serait bientôt assis sur le trône de Péking, il lui eût parlé plus vrai, s'il lui eût dit que son peuple tout entier, avec ses mœurs, son langage et son pays, allait s'engouffrer pour jamais dans l'empire chinois. Qu'une révolution jette à bas la dynastie actuelle, et les Mantchous seront obligés de se fondre dans l'empire. L'entrée de leur propre pays, entièrement occupé par les Chinois, leur sera même interdite. A propos d'une carte géographique de la Mantchourie, dressée par les PP. Jésuites, d'après l'ordre de l'empereur Khang-Hi, le Père Duhalde dit qu'on s'est abstenu d'écrire des noms chinois sur cette carte ; et il en donne la raison suivante : « De