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incroyables : aussi est-elle d'un prix excessif, et destinée au seul usage des princes et des grands dignitaires de l'empire. Il n'en est pas ainsi de l'herbe de Oula ; ce troisième trésor de la Mantchourie est au contraire à la portée des plus pauvres. Le Oula est une espèce de chaussure faite avec du cuir de bœuf ; quand on la garnit d'une certaine qualité d'herbe qui croît seulement en Mantchourie, et qu'on nomme herbe de oula (oula-tsao), on éprouve aux pieds une chaleur douce et bienfaisante, même pendant le temps des plus grandes froidures. Cette herbe de oula se vend à vil prix ; et c'est, sans contredit par cet endroit qu'elle mérite véritablement le nom qu'on lui a donné. Pendant que les deux autres trésors vont entretenir l'orgueil et le luxe des grands ; celui-ci réchauffe les pieds du pauvre et du voyageur auxquels l'indigence interdit les bottes fourrées et les chaussures élégantes.

Comme nous l'avons dit plus haut, les Tartares Mantchous ont presque totalement abdiqué leurs mœurs pour adopter celles des Chinois ; cependant, au milieu de cette transformation de leur caractère primitif, ils ont toujours conservé une grande prédilection pour la chasse, les courses à cheval et le tir de l'arc. Dans tous les temps, ils ont attaché une importance étonnante à ces divers exercices ; et pour s'en convaincre, il n'est besoin que de parcourir un dictionnaire de la langue mantchoue. Tout ce qui a rapport à ces exercices est exprimé par des mots propres, et sans qu'on ait jamais besoin d'avoir recours à des circonlocutions. Il y a des noms particuliers, non-seulement pour les différentes couleurs du cheval, pour son âge et ses qualités, mais encore pour tous ses mouvements.