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peut encore mettre au nombre des lamaseries célèbres, celle de la Ville-Bleue, de Tolon-Noor, de Gé-Ho-Ëul ; et en dedans de la grande muraille, celle de Péking et celle des Cinq-Tours dans le Chan-Si.

Après avoir quitté la lamaserie de Tchortchi, comme nous entrions dans la bannière rouge, nous rencontrâmes un chasseur mongol, qui portait sur son cheval un magnifique chevreuil fraîchement tué. Nous en étions réduits depuis si longtemps à notre insipide farine d'avoine, assaisonnée de quelques morceaux de suif, que la vue de cette venaison nous donna quelque envie de varier un peu notre nourriture ; nous sentions d'ailleurs que notre estomac, affaibli par des privations journalières, réclamait impérieusement une alimentation plus substantielle. Après avoir donc salué le chasseur, nous lui demandâmes s'il serait disposé à nous vendre son chevreuil... Seigneurs Lamas, nous répondit-il, quand j'ai été me mettre en embuscade pour attendre les chevreuils, je n'avais dans mon cœur aucune pensée de commerce. Les voituriers chinois qui stationnent là haut, au-dessus de Tchortchi, ont voulu acheter ma chasse pour quatre cents sapèques ; je leur ai dit : Non. Seigneurs Lamas, je ne puis pas vous parler comme à des Kitat ; voilà mon chevreuil, prenez-le à discrétion. — Nous dîmes à Samdadchiemba de compter cinq cents sapèques au chasseur, et après avoir suspendu la bête au cou d'un chameau, nous continuâmes notre route.

Cinq cents sapèques équivalent à peu près à cinquante sous de France : c'est le prix ordinaire d'un chevreuil : un mouton coûte trois fois plus cher. La venaison est peu estimée des Tartares, et encore moins des Chinois. La