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croire, sans restriction, à la probité des disciples du Saint.

Le commerce du Grand-Kouren est très-florissant ; les marchandises russes et chinoises y abondent ; dans les opérations commerciales, les paiements s'effectuent toujours avec des thés en brique. Qu'on vende un cheval, un chameau, une maison, ou des marchandises de quelque nature que ce soit, la convention du prix se fait en thés. Cinq thés représentent une valeur d'une once d'argent ; ainsi le système monétaire, qui répugnait si fort aux idées de Franklin, n'est nullement en usage parmi les Tartares du nord.

La cour de Péking entretient au Grand-Kouren quelques Mandarins, sous prétexte de maintenir le bon ordre parmi les Chinois qui résident dans ce pays ; mais en réalité, c'est pour surveiller le Guison-Tamba, dont la puissance ne cesse de donner de l'ombrage à l'empereur de la Chine. Le gouvernement de Péking n'a pas oublié que le fameux Tching-Kis-Khan est sorti de la tribu des Khalkhas, et que le souvenir de ses conquêtes ne s'est pas encore effacé de la mémoire de ces peuples belliqueux. Aussi le moindre mouvement qui s'opère au Grand-Kouren, ne manque pas d'aller donner l'alarme à l'empereur de Chine.

Dans l'année 1839, le Guison-Tamba descendit à Péking pour rendre visite à l'empereur Tao-Kouan. Aussitôt qu'en Chine on eut bruit de son dessein, la terreur s'empara de la cour, et le nom du grand Lama des Khalkhas fit pâlir l'empereur dans le fond de son palais. Des négociateurs furent envoyés pour tâcher de détourner le Guison-Tamba de ce voyage, ou du moins pour arranger les choses de manière à ne pas compromettre la sûreté de l'