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qu'elles supportent. Il serait difficile de dire à quel ordre d'architecture connue peuvent se rattacher les temples bouddhiques de la Tartarie. C'est toujours un bizarre système de baldaquins monstrueux, de péristyles à colonnes torses, et d'interminables gradins. A l'opposé de la grande porte d'entrée est une espèce d'autel en bois ou en pierre, affectant ordinairement la forme d'un cône renversé ; c'est là-dessus que trônent les idoles. Rarement elles sont debout ; on les voit presque toujours assises les jambes croisées. Ces idoles sont de stature colossale, mais leurs figures sont belles et régulières ; à part la longueur démesurée des oreilles, elles appartiennent au type caucasien ; elles n'ont rien de ces physionomies monstrueuses et diaboliques des Pou-Ssa chinois.

Sur le devant de la grande idole, et de niveau avec l'autel qu'elle occupe, est un siège doré où se place le Fô-vivant, grand Lama de la lamaserie. Toute l'enceinte du temple est occupée par de longues tables, presque au niveau du sol, espèce de divans placés à droite et à gauche du siège du grand Lama, et s'étendant d'un bout de la salle à l'autre. Ces divans sont recouverts de tapis, et entre chaque rang il y a un espace vide, pour que les Lamas puissent librement circuler.

Quand l'heure des prières est arrivée, un Lama, qui a pour office d'appeler au chœur les hôtes du couvent, va se placer devant la grande porte du temple, et souffle de toute la force de ses poumons dans une conque marine, en regardant tour à tour les quatre points cardinaux. Le bruit sonore de cet instrument, qui peut aisément se faire entendre à une lieue de distance, va avertir au loin les