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à la saison des pluies, la rivière qui baigne les murs de Tchao-King, venant à briser ses digues, inonda la campagne et causa partout de grands ravages. Dès que les eaux furent rentrées dans leur lit, on travailla à construire de nouvelles digues plus puissantes que celles qui venaient d’être enlevées. Comme le bois n’était pas suffisant, les mandarins décrétèrent, par un édit, qu’on était autorisé, pour cause d’utilité publique, à abattre tous les arbres qui ne portaient pas de fruits partout où on en trouverait. Dans de telles circonstances les Chinois, autorisés en quelque sorte par les magistrats, deviennent d’impitoyables ravageurs ; ils ne manquent jamais de profiter de ces moments de licence pour faire du mal à ceux qu’ils n’aiment pas. La multitude ne tarda pas à se ruer dans le jardin de la mission ; on coupa, on saccagea tout ce qui s’y trouvait. Les domestiques, qui, pour la plupart, étaient des nègres esclaves des Portugais, voulant s’opposer à cette dévastation, ne firent qu’augmenter le désordre. La maison elle-même fut envahie, les portes et les fenêtres volèrent en éclats, les meubles furent brisés et dispersés la toiture elle-même fut enlevée, et les habitants, forcés de se sauver, étaient poursuivis de tous côtés avec des huées et à coups de pierres. Après ces exploits, les émeutiers rentrèrent triomphalement dans la ville au bruit du tam-tam, tout fiers de la victoire qu’ils venaient de remporter sur les nations occidentales.

Le lendemain, le P. Ricci se rendit au tribunal, et demanda le pardon des auteurs de ce désordre, priant simplement le gouverneur de défendre par un édit de molester à l’avenir les missionnaires. Le P. Édouard