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pendant le fier gouverneur des deux Kouang, à la vue des riches et curieux présents qu’on lui apportait, modifia aussitôt la rude arrogance de sa physionomie, et lui donna insensiblement une rassurante impression de bienveillance et de mansuétude. Il ordonna à son interprète de dire aux étrangers qu’ils pouvaient rester dans leur port de Macao et continuer à se livrer à leur trafic, tout en obéissant ponctuellement et filialement aux lois des mandarins, qui étaient pères et mères des étrangers aussi bien que des hommes du royaume Central… Puis, après avoir jeté un regard plein de convoitise sur les offrandes des Portugais, il leur fit dire qu’il n’accepterait ces présents qu’à la condition qu’on en recevrait le prix. Ayant alors demandé à l’interprète la valeur de chaque objet, il fit scrupuleusement payer le tout, séance tenante. Cette merveilleuse abnégation n’était que pour le public, car il fit ensuite avertir secrètement les Portugais qu’avec cette somme ils devaient acheter à Macao de nouveaux présents, et les lui apporter eux-mêmes le plus tôt possible.

Le P. Roger ne manqua pas d’exprimer au vice-roi son vif désir d’avoir une résidence dans l’intérieur de l’empire. Il lui fit savoir qu’il étudiait avec ardeur la langue du pays, et que son bonheur serait de passer sa vie avec les Chinois. Le vice-roi parut écouter cette demande avec grande satisfaction, et donna au missionnaire l’espérance qu’il pourrait obtenir cette faveur une autre fois, lorsqu’il reviendrait. L’ambassade prit donc congé du gouverneur des deux Kouang, et elle fut reconduite à bord de ses navires au son des tam-tams et au milieu d’un im-