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faisait naître cette importante entreprise, au point de vue des intérêts politiques et commerciaux mais le saint et zélé missionnaire envisageait par-dessus tout la gloire de Dieu et le salut des âmes. Pereira se trouvant alors dans le détroit de la Sonde, il fut convenu qu’il irait rejoindre Xavier à Malacca.

Un certain Alvarès, gouverneur de la citadelle de Malacca, ennemi personnel de Pereira et jaloux qu’on lui eût donné le titre d’ambassadeur, résolut de faire échouer l’entreprise. Aussitôt que Pereira fut arrivé, il prétendit faussement que la ville devait être assiégée par les Malais, et qu’ayant peu de monde à leur opposer, il était dans la nécessité de consigner dans le port le navire de Pereira avec son équipage ; et, afin de donner plus d’efficacité à ses ordres, il exigea qu’on lui apportât dans son palais le gouvernail du navire. François Xavier usa vainement de toute son influence pour fléchir la résistance du gouverneur. Il alla jusqu’à mettre sous ses yeux ses lettres de nonce apostolique qu’il avait jusque-là tenues cachées, par modestie, et qui frappaient de la peine d’excommunication ceux qui s’obstineraient à l’entraver dans l’exercice de sa mission. Le gouverneur de Malacca fut insensible aux menaces comme aux prières. François Xavier, voyant que les hommes, au lieu de lui être en aide, ne servaient qu’à lui susciter des obstacles s’abandonna uniquement à la Providence. Il changea de plan, résolut de se rendre comme il pourrait à Sancian de se faire l’ami de quelque Chinois et puis d’aller se jeter, n’importe où sur un point des côtes de l’Empire. S’il avait le bonheur d’être arrêté et conduit en prison, du moins pourrait-il annoncer