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III.


En 1615, le gouvernement de l’empereur envoya à Nanking un mandarin de premier ordre nommé Kio-Tchin, pour être assesseur du Li-Pou, ou cour souveraine des rites, qui, entre autres attributions, connaît des coutumes et des sectes des étrangers admis dans l’empire. Outre que ce personnage aimait peu les chrétiens et les missionnaires, il avait plusieurs raisons particulières de leur vouloir du mal. Un de ses amis intimes, bonze instruit, bon écrivain et plein de vanité, avait publié contre le christianisme un livre auquel, disait-il, il n’y avait rien à répondre. Le docteur Paul en fit la réfutation, mais d’une façon si vive et si écrasante, que le pauvre bonze ne put survivre à sa défaite ; il en mourut de chagrin. Kio-Tchin fut très sensible à cet événement. Il avait d’ailleurs été battu lui-même personnellement et d’une manière humiliante par les docteurs Paul et Michel dans certaines conférences qu’ils avaient eues sur la religion. Il méditait donc un plan de vengeance contre les chrétiens, lorsqu’il apprit que deux des principaux magistrats avaient présenté une requête à l’empereur pour l’inviter à faire traduire en chinois, par les missionnaires, les meilleurs livres européens, afin d’enrichir par là le trésor de la littérature nationale. Comme il avait la prétention de devenir colao, ou premier ministre, il crut utile à son ambition de se poser ouvertement comme le défenseur zélé des croyances de l’antiquité