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En déclarant que l’adoration du Ciel se rapportait au vrai Dieu, et que le culte des ancêtres et de Confucius était un hommage légitime de la piété filiale envers les chefs de famille et les bienfaiteurs de la patrie, les missionnaires favorisaient beaucoup les idées chinoises au lieu de les heurter, et ne pouvaient manquer par là de devenir très-populaires, surtout dans la classe des lettrés, qui leur abandonnaient volontiers les croyances des bonzes et des Tao-Sse.

Le P. Lombard considérait tous ces usages chinois sous un aspect bien différent. L’estime qu’il portait aux talents et aux vertus du P. Ricci avait suspendu son jugement et ses scrupules sur le système et la pratique de cet homme apostolique ; mais se voyant à la tête de la mission et responsable de tous les abus qui pourraient s’y commettre, il crut de son devoir d examiner de plus près ces questions importantes. Il se mit à lire les ouvrages de Confucius et de ses plus célèbres commentateurs, il consulta les lettrés qui pouvaient lui fournir des lumières et lui inspirer le plus de confiance. Plusieurs autres missionnaires jésuites agitèrent entre eux ce sujet de controverse : les sentiments furent partagés. Le P. Lombard composa à cette occasion un ouvrage où la matière fut traitée à fond. Les conclusions en étaient que la doctrine de Confucius et celle de ses disciples étaient plus que suspectes de matérialisme et d’athéisme ; que les Chinois ne reconnaissaient, en réalité, d’autre divinité que le Ciel et sa vertu naturelle répandue dans tous les êtres de l’univers ; que l’âme n’était, dans leur système, qu’une substance subtile et aérienne ; et qu’enfin leur opinion sur l’immortalité de l’âme