Page:Huc - Le christianisme en Chine, en Tartarie et au Thibet, tome 2.djvu/225

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

une large vallée, on aperçut à l’horizon comme une multitude d’hommes et de chevaux se mouvant sur les flancs d’une colline et paraissant se diriger vers la caravane. La vue des hommes dans les steppes de la Tartarie au lieu de rassurer est au contraire une source d’effroi, car on pense toujours avoir affaire à des ennemis. Le défiance s’empara en même temps des deux troupes, et elles s’arrêtèrent pour observer leurs mouvements réciproques. Comme on se faisait peur mutuellement, il était à présumer que les deux troupes étaient composées de gens honnêtes, et non de brigands. On avança donc de part et d’autre, et bientôt les deux caravanes, celle qui allait au Cathay et celle qui en revenait, se trouvèrent mêlées ensemble et s’accablèrent de questions sans que personne prît grand soin de faire les réponses. La vallée étant spacieuse et pourvue d’assez abondants pâturages, on campa ensemble, afin de pouvoir raconter à loisir les nouvelles de l’Orient et de l’Occident.

Le capitaine des marchands qui revenaient du Cathay s’entretint longuement avec le P. Goès. Il lui raconta que durant son séjour à Khanbalu il avait logé dans l’hôtel des ambassadeurs avec un savant religieux de l’Occident nommé Li-Ma-teou (Matthieu Ricci). On sait qu’en effet le P. Ricci à son arrivée à Péking avait habité avec des étrangers venus de l’Inde et du Turkestan. Il n’y avait donc plus de doute le Cathay, c’était la Chine, et Khanbalu était Péking. Le capitaine des marchands donna au P. Goès des détails pleins d’intérêt sur l’influence dont les missionnaires jouissaient à la cour ; il lui dit qu’ils avaient offert à l’empereur une horloge, une épinette et plusieurs