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cette divinité avait pour spécialité la conservation des yeux : aussi la représentait-on avec un gros œil supplémentaire qu’elle portait au beau milieu du front.

La procession qu’on faisait en son honneur avait pour but de recueillir, dans chaque famille du district, des offrandes qui pussent fournir aux frais de la pagode. En passant devant la résidence du P. Lombard, le cortége entra tambour battant, et eut bientôt envahi la cour intérieure. Le P. Lombard sortit en toute hâte et fut fort surpris de voir dans sa maison cette espèce de cyclope chinois que huit bonzes portaient en triomphe. Il va droit au président de la cérémonie et lui demande ce qu’on vient faire chez lui. D’abord tous les membres du cortége parurent vivement blessés de ce que le religieux européen n’avait donné aucun signe de respect en présence de leur dieu oculiste. Dans toutes les maisons où il était entré, on s’était prosterné devant lui, on avait allumé des cierges et brûlé des parfums. — Nous venons, dit le président, prélever la contribution pour élever un temple au Hao-Kouang. — Votre zèle religieux, répondit le P. Lombard, me touche profondément ; mais je suis affligé de voir que vous ne connaissez pas le seul Dieu qui mérite les hommages et les adorations des hommes ; pour moi, j’adore ce Dieu véritable ; vos idoles ne sont rien pour moi, et je ne puis contribuer à leur culte… À ces mots, la multitude fit entendre des murmures et se mit bientôt à réclamer à grands cris l’offrande prescrite. Un lettré quelque peu ami du P. Lombard, désireux de le tirer de cet embarras, s’approcha et lui dit : Maître, vous êtes étranger sur cette terre, vous recevez l’hospitalité, pourquoi re-