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parut, les émeutiers, qui encombraient la salle d’audience, s’écrièrent que c’était là le plus méchant et celui qui était l’auteur de leurs blessures. Aussitôt le mandarin lui fit donner cinquante coups de bambou et le chargea ensuite d’une lourde cangue. On sait que la cangue est une énorme pièce de bois, percée au milieu pour faire passer la tête du condamné, et qui pèse de tout son poids sur ses épaules, de façon que cet atroce supplice réduit un homme à n’être plus, en quelque sorte, que le pied ou le support d’une lourde table. Le frère Sébastien demeura exposé avec cet affreux instrument de supplice devant la porte du tribunal. On lisait sur la cangue l’inscription suivante, en gros caractères rouges : « Condamné pour avoir outragé et battu des bacheliers… » Les ennemis de la mission, après avoir reçu cette sorte de satisfaction, oublièrent les coups de bambou qu’on leur avait assénés et rentrèrent fiers et glorieux dans leur bourg.

Le P. Cataneo, qui redoutait les conséquences de semblables émeutes, eut recours pour les prévenir à un expédient qui lui réussit merveilleusement. Comme il avait remarqué que l’élévation de sa petite église donnait de l’ombrage aux Chinois, il la fit démolir, ne réservant pour les cérémonies religieuses qu’une simple salle, sans ornement, et dont il avait fait disparaître les tableaux et les curiosités qu’on aimait tant à venir admirer.

Quelques jours après, plusieurs mandarins supérieurs passant par Tchao-Tcheou, exprimèrent le désir d’aller visiter la résidence des étrangers. Le gouverneur de la ville s’empressa de conduire ses hôtes à la mission catholique, où il ne trouva guère