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Provins, persil, et aultres bonnes erbes, de grant odeur.[1]

« Il luy a entour icelle ille, plusieurs grandes bestez, conme grans beuffz, quelles ont deux dans en la gueulle, conme dans d’olifant, qui vont en la mer. De quelles, y en avoict vne, qui dormoict à terre, à la rive de l’eau, et allames o nos barcques, pour la cuydez prandre ; mais incontinant que fumes auprès d’elle, elle se gecta en la mer. Nous y vimes paroillement des ours et des renars. Cette ille fut nommée l’ille de Bryon[2]. Aux environ d’icelles illes, y a de grandes marées, qui portent comme suest et norouaist. Je présume mielx que aultrement, à ce que j’ay veu, qu’il luy aict aulcun passaige entre la Terre Neuffve et la terre des Bretons[3]. Sy ainsi estoict, se seroict vne grande abréviacion, tant pour le temps, que pour le chemyn, si se treuve parfection en ce voyage[4]. À quatre lieues de ladite ille, il luy a la terre ferme à ouaist surouaist, la quelle paroit conme vne ille, avi-

  1. Le Frère Marie-Victorin en compagnie de qui j’ai visité cette île, s’écriait en y herborisant : « C’est bien cela ! Et rien n’a bougé ici depuis trois siècles. Là-haut sur la falaise, les grands arbres et les prairies pleines de gesses purpurine, à mes pieds le froment sauvage et les pois de mer « fleuris comme pois de Bretagne ». Et la quantité de raisins « ayant la fleur blanche dessus, » quelle description merveilleusement précise de la grande canneberge en fleur, gardant encore mous et juteux ses raisins de la saison passée ! Quant aux fraises, roses incarnates, persil de mer et spiranthes embaumées, il n’y aurait qu’à se pencher pour en cueillir des monceaux. » (Croquis Laurentiens)
  2. En l’honneur et mémoire de feu très illustre Seigneur Messire Philippes Chabot Comte de Burensais, et de Chargny, Seigneur de Brion, et Amiral de France, et protecteur de Cartier.
  3. Ce qui prouve que le Cap-Breton était connu mais qu’aucun Français n’avait pénétré dans le golfe par ce qu’on appelle aujourd’hui le détroit de Cabot que Cartier ne découvrit qu’au retour de son second voyage, et par où le trajet est plus court et plus facile.
  4. L’Escarbot dit que la perfection que cherche Cartier est de trouver un passage pour aller par là en Orient.