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séances un intervalle de vingt-quatre heures[1] ; mais cette stipulation n’est pas toujours strictement observée[2]. Au Conseil de Brabant, par exemple, on se contente de laisser le patient reprendre ses esprits, pendant une heure, dans la salle où la question avait été donnée ; le Conseil se borne à faire retirer le maître des hautes œuvres avec la sellette et « tout le reste de cet appareil désagréable[3] ». En général, le tribunal tout entier assiste à la réitération des aveux. Alors, mais alors seulement, il y a pleine preuve contre l’accusé et les magistrats peuvent rendre leur sentence.

Ce qui diminue singulièrement la valeur de cet aveu, c’est que le patient connaît d’avance le résultat d’une rétractation éventuelle : c’est la reprise immédiate des tourments : « qui une fois en la géhenne a confessé son délict, et après le nye, on le peut regehenner pour le faire persister et demeurer en sa cognoissance et confession[4] ». Aussi les rétractations sont-elles assez rares[5]. C’est à peine si, dans le courant du XVIIIe siècle, nous relevons une dizaine de procès-verbaux au bas desquels on trouve cette mention laconique : « Interrogé pourquoi il a avoué, a répondu que c’est par la force des tourmens » ; et le plus souvent les juges d’Anvers, notamment, déclarent ce désaveu « pure frivolyteit ende impertinencie ». Serpillon, lieutenant-général criminel au présidial d’Autun, qui n’est cependant pas un adversaire

  1. Ordonnance criminelle du 9 juillet 1570, article XL.
  2. « Sufficit horæ spatium aut ampliùs arbitrio judicis, medici, et chirurgi, qui semper præsentes sunt » [de Wynants, De publ. jud., xviii, 39].
  3. de Wynants, Comm. sur les ordonn. du Cons, de Brab., t. II, p. 377.
  4. Damhoudere, XXXVIII, 11.
  5. Le 31 décembre 1704, à Louvain, Arnold L…, voleur [Cons. d’État, cart. 362] ; le 9 décembre 1729, à Anvers, Clément D…, accusé de viol [Vierschaerboek, fo 5] ; le 18 avril 1746, à Liége, Jean C…, voleur [Reg. aux prisonn., ffo 28] ; le 5 avril 1747, à Liége, Marie-Joseph T…, voleur [Ibid., ffo 35]; le 21 novembre 1749, à Anvers, Corneille P…, voleur d’église [Vierschaerboek, ffos 297-301]; le 19 septembre 1750, à Liége, Jeanneton de V…, veuve Th…, voleuse [Reg. aux prisonn., ffo 51] ; le 13 décembre 1751, à Bruxelles, Bernard M…, voleur [Procès du Dross. de Brab., n° 38] ; le 26 mars et le 8 mai 1753, à Liége, Joseph C…, voleur [Reg. aux prisonn., fo 88] ; le 19 et le 21 décembre, à Liége, Jean-François S…, voleur [Ibid., fo 98] ; le 30 juillet 1753, à Bruxelles, Jean T…, voleur [Procès du Dross. de Brab., n° 39] ; le 13 mars 1758, à Liége, Jean-Michel L…, voleur [Reg. aux prisonn., fos 118-119] ; le 18 juillet 1764, à Liége, Nicolas M…, voleur |Ibid., fo 163] ; le 6 décembre 1787, à Liége, Adrien V…, sommeur [Ibid., fo 299] ; à Anvers, les 4 et 6 juillet, 10 août, 30 et 31 octobre 1792, Philippe Mertens [Dossier aux arch. comm. d’Anvers).