Page:Hubert - La Torture aux Pays-Bas autrichiens pendant le XVIIIe siècle.djvu/50

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

part à une émeute, fut appliqué à la question depuis 3 h ½ heures de relevée jusqu’au lendemain matin à 4 h ¼ heures ; il avait demandé à plusieurs reprises d’être détaché, promettant de dire la vérité complète ; le Magistrat refusa : l’aveu devait précéder la délivrance[1].

Le greffier dresse un procès-verbal détaillé de tout ce qui s’est passé dans la chambre de la question. On laisse après cela le prisonnier quelque temps en repos ; on lui donne du vin ou quelque autre « confortatif » qu’il demande.

Le médecin et le chirurgien qui assistent à la séance ont pour mission de veiller à ce que les tourments ne mettent pas la vie du patient en danger ou ne l’exposent à demeurer estropié. On doit faire souffrir l’accusé le plus possible sans attaquer notablement les sources de la vie[2] : s’il succombait entre les mains du bourreau, l’inhumanité du système deviendrait par trop évidente[3]. Quelquefois le tribunal formule des instructions détaillées à l’usage des commissaires. Nous en avons trouvé des spécimens dans les dossiers des archives, notamment en cause de Romule Ackerini, natif de Rome, accusé d’avoir assassiné un domestique du marquis de Prié, et condamné

  1. Office fiscal du Grand Conseil de Malines, n° 121 de l’inventaire, liasse 28. Dans le même fonds, n° 89 de l’inventaire, liasse 26, nous trouvons le dossier du procès de Corneille 0…, appliqué le 7 août 1720 à la question durant six heures. Quand il se montra disposé à avouer, à condition qu’on diminuât quelque peu la force des tourments, « dat men hem ten minsten sijne beenen en harmen souden willen los maeken », on lui accorda cet adoucissement, mais on ne le détacha du banc qu’après un aveu complet.
  2. « Ad modum quæstionis quod attinet, is ejusmodi esse débet, ut salvus sit reus vel innocentiæ — vel pœnæ. Salvus autem secundum quosdam intelligitur ille, qui nec vitam perdidit, nec membrum aliquod. Addendum, nec vires homini ejusdem conditionis necessarias, quid enim si sutor, si faber, si arator fuerit tortus, quis dixerit salvum esse innocentiæ, si ita vires fractæ sint, ut operis diurnis familiam exhibere non possit ? Rectè igitur monent qui præcipiunt judici, ut quoniam medium tenere difficile est, in defectu potiùs peccet quàm in excessu » [Mattheus, Comm., xlviii, tit. xvi, 9, p. 719]. — « Le juge, dit Lebrun de la Rochette, doit, d’une âme purement chrestienne, pacifiquement et sans émotion qui altère la tranquilité d’un jugement rassis, faire continuer le tourment iusques à ce qu’il recognoisse que le questionné n’en puisse plus endurer davantage » [Le procès civil et criminel, pp. 136, 137].
  3. « Il faut éviter que le peuple fasse des commentaires malveillants sur la procédure » [Döpler, Theatr. pænarum, p. 374].