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Marche (février 1577), les ordonnances du duc d’Albe étaient devenues caduques[1]. De longues et opiniâtres controverses s’engagèrent sur ce point. Nous ne nous y arrêterons pas, et nous nous bornerons à constater que le Gouvernement autrichien tint pour maxime constante que la législation criminelle de Philippe II avait conservé sa force obligatoire[2].

Le droit de faire appliquer un accusé à la question appartient à tous les tribunaux criminels[3].

  1. L’article 5 de la Pacification de Gand porte : « Et afin que cependant personne ne soit légièrement exposé à quelque reprinse, caption ou dangier, tous les placcards ci-devant faits et publiez sur le fait d’hérésie, ensemble les ordonnances criminelles faictes par le duc d’Alve, et la suite et exécution d’icelles, seront surceyz et suspendus, jusques à ce que par les Estatz généraulx, aultrement en soit ordonné. »

    Plusieurs jurisconsultes, notamment Zypæus [Notitia juris belgici, t. II, p. 109] et Anselmo [Tribonianus belgicus, t. X, 1. 1], déduisent de cette disposition la caducité des ordonnances. Mais la plupart des auteurs sont d’un avis contraire. Wynants estime que Zypæus et Anselmo « se trompent lourdement, puisque ceux-là même qui auraient dû avoir été les auteurs de la révocation, à sçavoir les États confédérez, l’observent encore aujourd’hui chez eux » [Remarques sur les ordonnances du Conseil de Brabant du 13 avril 1604, t. II, p. 294]. De Ghewiet, Loovens, Voorda et bien d’autres sont de l’avis de Wynants, et jugent que l’article précité de la Pacification de Gand ne s’applique qu’aux dispositions de l’ordonnance de 1570 qui traitent des matières religieuses.

  2. Nous en avons plusieurs preuves : la déclaration de l’archiduchesse Marie-Élisabeth du 26 avril 1735, prescrivant l’observation des articles 53, 54, 56 de l’édit du 9 juillet 1570 dans l’instruction des procès criminels intentés à charge de fugitifs ou de latitants. [Plac. de Brab.. t. VII, p. 60] ; le décret de Marie-Thérèse, du 6 septembre 1762, ordonnant au Conseil de Flandre de se conformer, dans les procès à charge de criminels fugitifs de la ville de Gand, au contenu de l’article 58 du même édit [Plac. de Fland., t. V, 1141] ; enfin la circulaire adressée par le Comte de Cobenzl aux conseils de justice, le 7 août 1765, où nous lisons : « Comme nous sommes de plus informés qu’une partie des irrégularités qui se commettent dans les procédures criminelles, provient de ce qu’on n’observe point partout uniformément l’ordonnance du 9 juillet 1570 concernant le stile et manière de procéder en matière criminelle, nous vous ordonnons aussi de nous aviser s’il ne seroit pas nécessaire ou convenable d’ordonner que tous les tribunaux seront tenus de suivre exactement la susdite ordonnance » [Comm. pour la public, des anciennes lois et ordonn. de la Belgique. Procès-verbaux, t. I, p. 323].
  3. Dans beaucoup de communes, les chartes portent des garanties spéciales contre les abus de la torture : « Nous, ne nuls de par nous ne poront metre bourgois ne bourioise à mort, ne justiche fair sour eaus, ne metre à jehine, se che n’est par les eschevins de Gand » [Mandement du comte Guy, 8 avril 1297, dans Gheldolf, Coutumes de la ville de Gand, t. I, p. 495]. — « On ne peut mettre à la torture des bourgeois habitants de la ville d’Alost, sans avoir préalablement obtenu du prince acte de non-préjudice » [Homologation des