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et sans aucun signe de repentir ou conversion, mais au contraire avec des signes trop clairs de désespoir, et reclamants toujours leur innocence et protestant jusqu’au dernier moment que leur aveu avoit été forcé et arraché par les tourments selon que presque tout le peuple spectateur a unanimement avoué au temps de l’exécution.

» Pour copie conforme :(S.) L. Descry,
» notaire de la mense coure épiscopale.

» Certifié : (S.) Bouqueniau,
» avocat fiscal du prince-évéque.

» Déposition analogue du chirurgien Guillaume De Cray, de Ruremonde.
» Même jour, Pierre Perey, chaudronnier à Ruremonde.
» Même jour, François Brabander, maître vitrier à Ruremonde ».

La déclaration si grave des religieux liégeois ne fut pas même discutée, et c’est par hasard que nous l’avons découverte au fond d’une farde de papiers sans importance, dans le dossier de l’affaire Mertens[1].

Peu de temps après, nous voyons les échevins d’Anvers se disposer de nouveau à torturer des accusés. Le 17 janvier 1794, ils condamnent à la question François B…, Georges H.… et Benedict S…, « dry complète schelmen, deugenieten ende doortrapte dieven ». Ceux-ci demandèrent leur grâce au Gouvernement, et l’affaire était toujours pendante quand les Français s’emparèrent définitivement de la Belgique.

Le 23 brumaire an III (17 décembre 1794), à la suite de la victoire décisive de Fleurus qui fit rentrer la Belgique sous la domination française, une proclamation des Représentants du peuple français auprès des armées du Nord et de Sambre-et-Meuse, porte à l’article 1er  : « La torture est abolie[2] ».

Ainsi disparaissait définitivement de nos codes, après une lutte séculaire, un mode de procédure inefficace autant que barbare. À leur grand regret, nos magistrats durent renoncer à la torture, de même que leurs ancêtres

  1. Mertens périt sur la roue à Anvers, le 27 septembre 1793.
  2. Dans le pays de Liége, il y eut encore de nombreux cas de torture de 1792 à 1794 ; nous en avons relevé trois à Liége, un à Bilsen, un à Hasselt, quatre à Munsterbilsen, six à Vliermael. Certains accusés sont torturés quoique « saisis au flagrant » [Registre aux prisonn. de Liége, fo 305], ou même quand les juges déclarent que, malgré ses dénégations, l’accusé est « en évidence » l’auteur du crime.