Page:Hubert - La Torture aux Pays-Bas autrichiens pendant le XVIIIe siècle.djvu/133

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

faiblesse et de paralysie partielle où l’avaient réduit les supplices[1] ; une fois de plus la Vierschaere traita ses réclamations de « frivolyteit ende impertinentie ». Le 29 octobre, l’accusé prit place sur la sellette pour la quatrième fois. Au bout d’une heure, il avoua tout ce que l’on voulut, mais le 31 octobre il rétracta de nouveau ses aveux ; cette fois, on le réappliqua séance tenante pour la cinquième fois : il avoua au bout de dix minutes. Le 2 novembre, il retira tout ce qu’il avait dit ; immédiatement le bourreau s’empara de lui ; cette fois ses forces le trahirent après dix-neuf minutes, mais, pour la sixième fois, il revint sur ses aveux le lendemain. Neuf mois se passèrent : le 25 juillet 1793, la Vierschaere se réunit pour procéder à la septième séance de torture infligée à Mertens. Celui-ci, qui avait réclamé sans succès auprès du Conseil de Brabant contre cet excès de cruauté[2], ne résista pas davantage. Il se reconnut coupable de tous les crimes dont on le chargeait, fut condamné à mort et exécuté[3] le 21 septembre 1793.

Mertens était-il coupable ? il nous serait difficile de nous prononcer, même après l’étude attentive que nous avons consacrée aux pièces du procès ; mais ce que nous croyons pouvoir dire sans crainte d’erreur, c’est que les sept horribles séances tenues dans la chambre de torture du Steen n’apportèrent aucune preuve de nature à déterminer la conviction d’un juge éclairé. Ce que nous savons aussi, c’est que les magistrats anversois se laissèrent fortement influencer par les antécédents de l’accusé. Celui-ci avait été dénoncé comme complice par des Gueldrois condamnés du chef d’incendie et de vol en bande. Le complice de ces brigands était évidemment capable de tout ! L’écoutéte revient constamment au cours du procès sur les graves

  1. « Wordende verders in feyt geposeert dat den gevangene door de torture op synen persoon geappliceert in syne leden verminckt is, ende eene volslaege lamenigheyd aen zynen lincken erm ende hand is toegebracht geworden, waer oppe subsidiairelyk excipierende sustineert ten eynde voor t’ recht sal verklaert worden dat den gevangenen buyten staet is van verder op de torture geappliceert te worden ende dat abvolgens alle verdere scherpere examinatie op zynen persoon sal komen te cesseren » [Vierschaerboek, » séance du 27 octobre 1792, fo 369].
  2. « Door welcke vreede en aenhoudende tourmenten afgemath en als uytsinnig ben » [Pétition du 30 août 1793].
  3. En marge de la sentence de condamnation, fo 31 du Registre de la Vierschaere, on lit : « Facta est executio die sequenti, horà duodecimà meridianà in foro, applicatione in rotà, strangulatione et cruris fractione cum ictu gratiæ ».