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cédure ; parmi les choses nouvelles que nous y relevons, il faut noter l’établissement de rappel en matière criminelle, la défense d’office des accusés par un avocat et la suppression de la torture[1].

Enfin, le 3 avril 1787 parut l’Édit de l’empereur pour la réformation de la justice aux Pays-Bas. L’article 63 porte : « Nous avons aboli et abolissons, dans tous les tribunaux de justice de nos dites provinces des Pays-Bas, l’usage de la torture[2] ».

Joseph II devançait la Révolution française, et, à la différence de son beau-frère Louis XVI, prenait une décision radicale et hautement louable. Car si la prudence conseille d’ajourner les réformes insuffisamment étudiées et mûries, les souverains, qui ont charge d’âmes, ne doivent pas, sous pré-

    une erreur proscrite par différents décrets… S’il est vrai, comme ils l’insinuent, que les preuves faites au procès constatent que S… est réellement coupable, et que les dénégations sont fausses, ils doivent le condamner, comme ils ont condamné ses complices, sans qu’il soit nécessaire de l’exposer aux tourments de la question qui deviendroit pour lors une cruauté inutile ; si, au contraire, les preuves faites à sa charge ne sont point assez convaincantes pour décider qu’il est criminel, les aveux que l’on pourroit en arracher dans les tourments ne pourront rien ajouter à la conviction » [Cons. privé, cart. 710] ; — le 13 octobre 1785, même interdiction au Drossard de Brabant, en cause de Jacob D…, Alexandre B…, Isaac-Abraham D…, Joseph L…, vagabonds juifs accusés de vols de grand chemin. Le Conseil privé annonce que la torture sera provisoirement abolie [Cons. privé, cart. 755bis] ; — le 9 novembre 1785, id. au Magistrat d’Ypres qui demande, à grand renfort d’arguments textuellement empruntés à Muyart de Vouglans, « un grand exemple de justice et de terreur », en cause de Pierre-Ignace G…, accusé d’avoir assassiné sa femme [Ibid.] ; — le 7 décembre 1785, id. aux Bourgmestre et échevins du Franc de Bruges, en cause de Jean H…, accusé d’empoisonnement [Cons. privé, cart. 720).

  1. Ce volumineux manuscrit, formé de huit gros cahiers in-folio, se trouve dans le carton 755bis du Conseil privé. Une note de la main de M. Gachard porte : « Le rédacteur de ce travail fut M. de Robiano, conseiller au Conseil de Brabant, qui l’accomplit sous la direction de M. de Crumpipen, chancelier de Brabant, spécialement chargé par le Gouvernement de la formation d’un code criminel. Le fond en appartient à un mémoire de M. de Fierlant, président du Grand Conseil de Malines ». Les auteurs font connaître, au début de leur œuvre, les principes qui les ont guidés : « Nous nous sommes fait un devoir de suivre les règles de la nature, celles d’une sage philosophie, et le vœu de l’humanité, par préférence à ces lois anciennes presque toutes marquées au coin de l’ignorance ou d’une sévérité excessive, à ces maximes déraisonnables, à ces usages révoltans, transmis d’âge en âge, et dont les juges, même les plus instruits, se font souvent un scrupule de s’écarter ».
  2. Collection imprimée de placards appartenant aux Archives générales du Royaume, t. XXII.