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le Conseil de Flandre du chef de faux. Un décret des gouverneurs généraux en date du 23 avril enjoignit au Conseil de porter sa sentence à la connaissance du souverain avant de la mettre à exécution. Le 11 octobre, Bauwens fut condamné à la peine capitale ; en notifiant cet arrêt à l’Empereur, le Conseil de Flandre ajoutait que Bauwens serait appliqué à la torture « pour la révélation de ses complices[1] ». Immédiatement Albert et Marie-Christine le lui défendirent ; ils reconnaissaient que la révélation des complices importait à l’ordre public, mais ajoutaient qu’à leur avis, « la torture ne répandrait aucun jour ». En conséquence, on dirait au condamné qu’il lui restait un moyen de sauver sa vie : faire l’aveu complet et sincère de ses crimes et dénoncer ses complices[2].

Le Conseil insista, le 15 novembre, et fit valoir qu’il lui « seroit désagréable » de faire les devoirs prescrits par Sa Majesté[3] ». Le Gouvernement ne s’arrêta pas à cette protestation ; il maintint sa décision première et interdit aux juges d’aller au delà, même si l’accusé refusait de répondre ou si ses réponses n’étaient pas satisfaisantes[4]. Le Conseil de Flandre dut s’incliner devant cet ordre formel, bien qu’il y trouvât « des inconveniens,… de

  1. « Nous avons, au surplus, résolu de l’appliquer à la question ordinaire et extraordinaire pour tenir de sa bouche la vérité et circonstances qui ont accompagné les falsifications ultérieures dont il est accusé, nommément au sujet du testament de Marie Thérèse Supyn. Nous avons jugé cette application d’autant plus nécessaire, que de ses réponses doit résulter principalement à quel point sont coupables ses complices, surtout celui qui a fabriqué pour lui les faux actes dont il est accusé et en partie convaincu, lequel est déjà depuis longtemps détenu es nos prisons » [Archives de l’État à Gand, Brieve en rescriptien, 1774-1785, E, Conseil de Flandre, fo 204, publié par Ad. Dubois dans les Procès-verbaux de la Commission royale pour la publication des anciennes lois et ordonnances de la Belgique, t. VII, p. 109].
  2. Ibid., H, Conseil de Flandre, fo 75, Procès-verbaux, t. VII, pp. 111, 112.
  3. Ibid., E, Conseil de Flandre, fo 205, Procès-verbaux, t. VII, pp. 112, 113.
  4. « C’est notre intention que vous fassiez au prêtre Bauwens la lecture de l’arrêt qui le déclare convaincu de crime capital et qui le condamne à la torture, que, cette lecture étant faite, vous fassiez faire les préparatifs et la démonstration de la torture, sans cependant y faire appliquer le même Bauwens ; que vous l’interpelliez de s’expliquer sur tous les points sur lesquels vous estimerez qu’il est important d’avoir des éclaircissements, que, quelque puisse être le résultat de cette démarche de démonstration, vous procédiez en avant aussi loin que la chose pourra aller dans le jugement du procès de cet accusé, et que vous conceviez une sentence définitive à sa charge dont vous nous ferez parvenir le projet avant de le prononcer ». Ibid., H, Conseil de Flandre, fo 77, Procès-verbaux, t. VII, pp. 113, 114.