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Pour la brièveté de l’exposition, nous appellerons sacrifices personnels ceux où la personnalité du sacrifiant est directement affectée par le sacrifice, et sacrifices objectifs ceux où des objets, réels ou idéaux, reçoivent immédiatement l’action sacrificielle.

Cette définition ne délimite pas seulement l’objet de notre recherche, elle nous fixe sur un point fort important : elle suppose, en effet, l’unité générique des sacrifices. Ainsi, comme nous le faisions prévoir, quand nous reprochions à Smith de réduire le sacrifice expiatoire au sacrifice communiel, ce n’était pas pour établir la diversité originelle et irréductible des systèmes sacrificiels. C’est que leur unité n’est pas telle qu’il se la représentait.

Mais ce premier résultat paraît en contradiction avec l’infinie variété que semblent présenter, au premier abord, les formes du sacrifice. Les occasions de sacrifier sont innombrables, les effets désirés fort différents, et la multiplicité des fins implique celle des moyens. Aussi a-t-on pris l’habitude, surtout en Allemagne, de ranger les sacrifices en un certain nombre de catégories distinctes : on parle, par exemple, de sacrifices expiatoires (Sühnopfer), de sacrifices d’actions de grâces (Dankopfer), de sacrifices demandes (Bittopfer), etc. Mais en réalité, les limites de ces catégories sont flottantes, enchevêtrées, souvent indiscernables ; les mêmes pratiques se retrouvent à quelque degré dans toutes. Nous ne prendrons à notre compte aucune des classifications couramment employées ; elles ne résultent pas, à notre avis, d’une recherche méthodique. Sans essayer d’en tenter une nouvelle qui serait exposée aux mêmes objections, nous nous contenterons d’emprunter ici, pour nous faire idée de la diversité des sacrifices, l’une des classifications données par les textes hindous.

    tion. Toutefois, comme la société est contaminée par le crime, la peine est en même temps pour elle un moyen de laver la tache dont elle est souillée. Le coupable remplit donc à son égard le rôle d’une victime expiatoire. On peut dire qu’il y a en même temps peine et sacrifice.