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synthèses subjectives, opérées par des sociétés entières, synthèses qui, chacune pou soi, sont capables de représenter un ensemble quelconque et même l’univers, sans que cet ensemble se décompose naturellement en autant de parties que le nombre considéré embrasse d’unités inférieures. Une pareille théorie suppose que les nombres ont, à l’origine, précisément la même valeur qu’ils ont, à notre connaissance, dans la mystique arithmétique tardive. S’il en est ainsi, on admettra sans peine que les nombres, qui président à la division du temps, sont essentiellement conventionnels.

Bref, la division du temps comporterait un maximum de convention et un minimum d’expérience. L’expérience précise viendrait à son heure lui donner un supplément d’autorité. Mais le souci d’exactitude expérimentale, qui s’applique quelquefois au calendrier, n’est jamais durable. De même que, en astrologie[1], les observations effectives font place à des schèmes d’observations simplifiées, appliqués mécaniquement, de même, en matière de temps, la nécessité de vérifier la coïncidence des périodes calendaires avec les périodes astrales cesse progressivement d’être sentie. Les termes de l’année officielle s’écartent insensiblement des termes de l’année réelle. Ainsi, la semaine lunaire des Chaldéens est devenue la semaine courante des Hébreux.

Nous ne pouvons pas assister aux conventions primitives qui ont institué les termes fondamentaux des calendriers. Mais nous pouvons nous en approcher, en constatant comment l’autorité sociale intervient dans leur fonctionnement. Les incertitudes sur le commencement réel de la lunaison sont tranchées, en Mésopotamie, par les astrologues royaux préposés à l’enregistrement des présages[2], en Judée, par l’autorité sacerdotale et le concours du peuple[3], à Rome, par

  1. Bouché-Leclercq, L’Astrologie grecque, p. 517 sq.
  2. Thompson, The reports of the magicians and astronomers of Nineveh and Babylon, Introduction, p. xviii sq.
  3. Schürer, Gesch. d. jüd. Volkes, I, 2e  édit., 616 sq.