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D’une part il est en effet constant que, après la révélation, après le changement des organes, dans des sociétés pour lesquelles nos informations sont assez complètes, comme chez les Arunta, le nouveau magicien a encore à apprendre, par tradition orale un certain nombre de formules et de rites nécessaires[1]. La même chose se passe pour les magiciens Murring[2]. Quelque importance qu’aient le contact direct, l’identification même avec les esprits, ils ne dispensent pas de l’éducation par les anciens dans les secrets de l’art magique.

D’autre part, même là où la tradition magique se fait le plus simplement, elle semble encore s’entourer d’une masse considérable de rites dont la portée imaginaire fait ressembler quelquefois complètement l’action des magiciens à l’action des esprits.

La relation intime entre les deux initiations s’exprime heureusement dans quelques faits. Ainsi ce semble être un principe chez les Murring de la côte que la révélation par Daramulum communique les pouvoirs sans communiquer la connaissance que donne la révélation par les autres magiciens[3].

Ce lien qui unit la tradition et la révélation magique provient des conditions mêmes de ces faits. Il ne s’agit ici que de phénomènes de croyance, où la foi et l’illusion jouent un rôle prédominant, quelque importance que puissent avoir les rites et les enseignements véritables. D’autre part, cette foi ne s’attache qu’à des objets tout traditionnels, à des personnes mythiques ou à des substances dont les propriétés sont indéfinies (os de mort, cristaux de roche), mais dont le pouvoir connu est nettement déterminé comme magique. C’est pourquoi la révélation ne fait que donner

  1. N. T., p. 525. Il s’agit d’acquérir un certain nombre de tours de main afin de réussir les passes indispensables.
  2. Howitt, On some Australian ceremonies of Initiation, J. A. I., XIII, p. 433.
  3. Howitt, ibid., p. 433 : Austr. Beliefs, J. A. I., XIII, p. 195.