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LABRADOR ET ANTICOSTI

le latin surtout, en un rien de temps, ce qui leur permettrait d’étudier encore une foule de belles choses, en attendant d’avoir à la lèvre les quelques poils qui indiquent, à n’en pouvoir douter, qu’il est l’heure de se présenter au seuil des vénérables corporations professionnelles de la médecine, du droit, du notariat.

Le ministère de l’Instruction publique de l’époque se laissa charmer par les beautés de la nouvelle méthode, et favorisa son inventeur. Sous ses auspices, Leroy exposa, dans une conférence qui avait réuni au château Saint-Louis toute l’élite intellectuelle de Québec, les merveilleux principes qui allaient révolutionner l’enseignement. Et pour démontrer qu’il ne s’agissait pas de choses en l’air, il appela au tableau noir un élève de seconde année de l’École normale, un élève très brillamment doué, mais qui n’avait pas la moindre idée de la déclinaison de Rosa, ni de la fameuse règle du que retranché. Eh bien, je le dis pour l’avoir vu, en quelques minutes l’élève traduisait correctement la phrase française qui lui était proposée et qui, par exemple, n’était pas extraite des endroits les plus compliqués des Caractères de La Bruyère.

Le public et la presse accueillirent avec faveur la nouvelle méthode et se félicitèrent de voir que notre pays allait peut-être en tirer beaucoup d’avantages. Je vous le demande : avec des petits Canadiens si intelligents, comme il y a partout plein les maisons, et avec une méthode de cette force, oui, je vous le demande, n’allions-nous pas enfin prendre la tête du monde civilisé ? — Bref, il fut donné à Leroy d’ouvrir à Québec une école, où les nouveaux principes pédagogiques pussent s’épanouir tout à leur aise. Mais il y eut, j’imagine, quelque chose qui fit défaut, soit dans la floraison, soit dans la fructification, puisque l’on ne cultiva pas longtemps la jeune plante. L’école cessa d’exister. Dès lors, si mes souvenirs sont fidèles, Leroy se mit à publier, dans les journaux de Québec, des articles sur sa fameuse méthode. Un peu plus tard, diverses brochures, aux titres énigmatiques, firent suite à ces articles. Il était visible