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LABRADOR ET ANTICOSTI

du ministère de la Marine et des Pêcheries pour se faire octroyer un permis de pêche au saumon, il paraît que l’on arrive, à force de saumon, de hareng et de morue, à s’assurer un revenu annuel de deux cents à trois cent cinquante piastres, suivant que la pêche est plus ou moins bonne. Mais comme il n’y a d’accordés que deux de ces permis, il faut reconnaître que la plupart des pêcheurs ont des bénéfices encore beaucoup moindres. Aussi, pour peu que l’on vise à devenir millionnaire, ce n’est pas ici qu’il faut venir tendre ses filets. Mais on peut vivre fort bien sans se proposer un but aussi extravagant. Je dirai plus tard comment il se fait que l’on arrive même à l’aisance, sur la Côte Nord, à si bon marché.

À une couple de milles de la chapelle, du côté de l’ouest, se trouve l’île aux Œufs, distante de la terre ferme d’un peu plus qu’un mille. Sa plus grande longueur est d’un mille à peine, et, pour ce qui est de cette dimension, l’île est perpendiculaire à la côte.

Cet îlot n’est qu’un rocher, sur lequel il n’y a presque pas de terre cultivable. Le gardien du phare y récolte pourtant sa provision de pommes de terre. Avant l’érection du phare, en 1870, personne n’y avait encore résidé. Les oiseaux y étaient alors en grande abondance et, par conséquent, les œufs aussi : cela suffit sans doute pour qu’il soit aisé de savoir à quoi s’en tenir sur l’origine du nom donné à cette île.

La direction même de l’île, qui est en travers du cours du Saint-Laurent, fait qu’il y a là un excellent abri pour les vaisseaux : quel que soit le vent qui souffle, ils y trouvent un havre sûr, soit d’un côté, soit de l’autre…tant que le vent ne change pas. Du côté est, il y a une batture le long de l’île ; mais, à l’ouest, c’est une muraille coupée à pic, où les flots viennent se briser.

Les alentours de l’île sont de bons endroits de pêche ; les pêcheurs de la Pointe-aux-Anglais vont y prendre le hareng. Les gens du Cap-Chatte, sur la côte sud, y viennent aussi faire la pêche du hareng et de la morue.