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Nous pleurions à chaudes larmes en l’implorant. Il s’approcha : « Donne-moi ta main ! » m’ordonna-t-il. Je la lui tendis. « Chair tendre ! Nous nous régalerons de cela dans quelques jours. »

Il s’éloigna un peu et alla se repaître d’animaux sanglants. Nous étions tristes et écœurées. Nous nous serrions l’une contre l’autre en gémissant.

Le soir vint. Une douce clarté emplit tout à coup notre prison. Une belle jeune fille se tenait devant nous, avec un sourire protecteur.

« Rassurez-vous, Princesses, nous dit-elle ; un petit garçon aussi bon que courageux accourt pour vous délivrer.

Elle nous caressa le front, et nous nous endormîmes comme si ses doigts avaient jeté le sommeil sur nos yeux. »

Le récit fut interrompu par la chute d’une princesse, que l’on releva avec une bosse au front.

Depuis quelques moments, elle se disputait avec une de ses sœurs et elles se pinçaient en cachette.

« Elles sont turbulentes », expliqua Alisette sur un ton de haute sagesse. « Ce sont les plus jeunes. »

Barsifoul s’arrêta : la fatigue le gagnait.

Il proposa : « Reposons-nous ici ! »

« Où sommes-nous ? Où sommes-nous ? »

— « Chut ! Pas tant de bruit. Gare à l’« Anguille Verte » !

— « Qui est-ce ? Qui est-ce ? Où est-elle ? »

— « Chut ! Écoutez-moi. Nous sommes à l’entrée du royaume de la « Joie des Enfants ». Quand on y pénètre, ce ne sont que divertissements et jeux charmants.

— « Oh ! le joli royaume ! Allons-y, Barsifoul. »

— « Écoutez encore ! Les enfants qui y sont entrés n’en sont jamais revenus. Il est habité par l’Anguille verte, qui change en pierre les petits imprudents. Promettez-moi de dormir tranquillement et de ne commettre aucune désobéissance... il vous en coûterait cher !

— « Nous obéirons, » dirent les petites princesses.

Mais elles soupirèrent à la pensée des joies défendues.

Elles en rêvèrent. Nelle ne parvenait pas à s’endormir ; elle poussa le coude de sa voisine :

— « Tu dors ? »

« Non. »

— « A quoi penses-tu ? »