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PREMIÈRE FORME LINGUISTIQUE

feste plus que des tendances très-faibles et très-rares à atteindre la couche supérieure. Il se peut que ces motifs aient été multiples, qu’ils aient été d’ordre fort divers, et le soin de les découvrir est une tâche ardue.

Cette tâche n’a pas encore été abordée. Elle doit avoir pourtant un heureux succès. Il y a motif à tout, et chaque jour on fait un pas du connu à l’inconnu.

Nul doute, au surplus, que la plus puissante de ces causes n’ait été l’entrée dans la vie historique et la production littéraire. Cette production témoigne déjà par elle-même, par elle seule, que la langue se suffisait telle quelle et se sentait en état, s’il est permis de s’exprimer ainsi, de répondre à tous les besoins d’une nation constituée. En ce sens, il n’est pas inexact de dire qu’à son premier pas dans la vie historique, l’homme atteint la période que l’on appelle en histoire naturelle la période de métamorphose régressive. C’est ce que l’avenir confirmera ou infirmera ; mais il n’est guère possible, à l’heure présente et dans les conditions scientifiques actuelles, de n’émettre que des assertions plus ou moins conjecturales.

Il est aisé de comprendre que le système d’une succession de racines, à idées toujours très-générales, ne devait offrir au langage que des moyens fort restreints. Il est impossible que le besoin inévitable d’exprimer les rapports ne se soit pas fait sentir de très-bonne heure ; or, ainsi que nous l’avons dit, la succession de mots-racines, ou, pour parler de façon plus exacte, de racines-mots, était la négation, l’exclusion même des éléments de relation, des éléments appelés à n’indiquer que les rapports : rapports d’activité ou de passivité, d’unité ou de pluralité, de passé, de présent, de futur. Une telle période, cependant, a dû exister. Il la faut reléguer, sans aucun doute, en des âges préhistoriques très-lointains, et, selon toute vraisemblance, elle succéda à l’âge plus ancien encore durant lequel se