pour le moins dégradé des idiomes indo-européens de l’Europe, et, selon toute vraisemblance, il nous aurait fait admirer longtemps encore ses formes antiques et précieuses, si la rude concurrence de l’allemand ne le menaçait d’une disparition prochaine. C’est ainsi que périssent chaque jour dans des luttes inégales, mais que rien ne saurait prévenir, des êtres pleins de vie et de santé qui, à la faveur de circonstances moins funestes, auraient connu de longues années et ne se seraient pas éteints, misérables, sans postérité.
Il est difficile de supposer qu’un système linguistique arrivé à l’âge le plus florissant, le plus riche de son développement, n’entre pas aussitôt dans la période de métamorphose régressive, et il est tout aussi difficile que cette période ne soit point caractérisée d’une façon spéciale par la tendance de plus en plus individualiste des idiomes de ce système. Nous savons, par exemple, que les langues dites indo-européennes ou aryennes (hindoues, éraniennes, helléniques, italiques, celtiques, germaniques, slaves, lettiques ) proviennent d’une mère commune, dont il a été possible de déterminer les éléments phonétiques et de restituer, au moins en ses traits essentiels, la morphologie, la structure : or, il est supposable que la période de formation prit fin au moment même où commencèrent à se manifester des divergences dialectales et qu’il n’y eut point d’intervalle sensible entre ces premiers temps et la période de métamorphose régressive. Le linguiste doit avant tout déterminer, ou, pour mieux dire, restituer les formes qu’affectaient au moment de leur division en dialectes les langues mères dont il n’existe pas de monuments écrits. Ainsi que nous l’avons dit, la tâche se trouve presque accomplie pour le système indo-européen ; mais elle est à peine ébauchée en ce qui concerne les langues sémitiques (chaldéen, syriaque, hébreu, phénicien, arabe, etc.) et est