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le départ jusqu’après cette formalité. Celui-ci accourut à la maison de poste, demanda les passeports du maréchal et les apporta à Lambot.

Pendant que le major prenait tout son temps pour les lire et les viser, un gros rassemblement se forma place de l’Oule. On commença d’invectiver contre Brune : « Le brigand ! le coquin ! l’assassin !… Il a porté au bout d’une pique la tête de la princesse de Lamballe ! » Sans s’inquiéter autrement, Brune mangeait des pêches que, sur sa demande, lui avait apportées dans sa calèche la maîtresse de l’hôtel du Palais-Royal, contigu à la maison de poste, Mme Molin. Cette femme, très alarmée par l’attitude menaçante de l’attroupement, conseilla au maréchal de monter à la chambre du nouveau préfet, le baron de Saint-Chamans, qui arrivé la veille, avait pris gîte dans son hôtel. Le préfet reçut Brune amicalement, descendit avec lui sur la place et exhorta la foule à se disperser. Les clameurs qui couvrirent sa voix lui révélèrent la grandeur du péril. « — Partez tout de suite, dit-il, chaque minute accroît le danger. » « — Mais mon passeport ? » « — Je vous l’enverrai par un gendarme qui vous rejoindra sur la route d’Orange. » La populace ameutée s’opposa au départ des voitures. Le préfet intervint encore, les postillons fouettèrent les chevaux, on réussit à se mettre en marche.