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LE MANOIR

d’administrer une dose de mandragore capable de procurer un sommeil doux et tranquille et de rétablir le calme dans l’esprit du vénérable seigneur. Mon plus grand désir est que vous me regardiez comme un serviteur fidèle, et vous jugerez de ma bonne foi et de mon savoir-faire par le résultat du sommeil du malade.

Le bon vieillard dormit, en effet, d’un sommeil réparateur, et à son réveil il se trouva mieux. Son esprit était en état de juger ce qu’on lui proposait. Il n’adopta pas sur-le-champ le projet de DuPlessis, mais on parvint à le convaincre, et il signa une délégation de pouvoir pour que DuPlessis pût agir en son nom dans cette délicate affaire.

Le lendemain, pendant que DuPlessis s’occupait de ses préparatifs de départ, Taillefer vint lui demander la permission de l’accompagner.

— Monsieur doit être content de la manière dont ma potion a agi sur l’illustre malade ?

— Sans doute, savant homme ; mais s’il existait un ordre d’arrestation contre vous ? On ne sait pas tout ce qui a pu se passer depuis votre départ de la Pointe-du-Lac. Si cet espiègle de garçon vous dénonçait ?

— Oh ! il n’y a pas de danger, monsieur ; cet enfant est aussi fidèle qu’il est intelligent. D’ailleurs, on me craint trop pour vouloir m’inquiéter. Personne n’osera se risquer à cela. Et, après tout, on n’ira pas me chercher sous le costume de votre serviteur. Voyez mes moustaches et mes cheveux ; je les ai peints avec une composition dont j’ai le secret, et je défie le diable de me reconnaître. J’ai appris par le vieux Papillon que l’affaire qui vous appelle à Québec peut offrir des dangers. Eh bien, laissez-moi vous servir ; ma tête vous vaudra mieux que celles des braves qui ne connaissent que le mousqueton et l’épée.