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LE MANOIR

Deschesnaux suivit la litière, mais à quelque distance, voulant avoir une conversation particulière avec Michel Lavergne, qu’il espérait voir bientôt arriver, et qu’il regardait comme l’agent le plus propre à exécuter ses cruels desseins. Il était à peu près à mi-chemin entre le fort de la Grande-Rivière et l’église d’Yamachiche, quand il entendit le galop d’un cheval. C’était celui de Lavergne.

— Chien d’ivrogne ! dit Deschesnaux, ton inconduite te fera bientôt monter à la potence ; je voudrais que ce fût demain.

— J’ai été retenu par M. l’intendant Hocquart, répliqua Michel. Mais sachez que je ne souffrirai plus de propos insolents de la part d’un homme qui, après tout, n’est qu’un serviteur comme moi.

Deschesnaux fut surpris de cette impertinence, mais il l’attribua à l’ivresse, et feignit de ne pas s’en apercevoir. Il se mit à sonder Michel afin de savoir si ce dernier consentirait à écarter le seul obstacle qui, dans son opinion, empêchait l’intendant de parvenir à un rang assez élevé pour récompenser ses fidèles serviteurs au-delà de leurs désirs. Et comme Lavergne avait l’air de ne pas comprendre, il lui dit, sans détour, qu’il s’agissait de tuer la personne qui était dans la litière.

— Oui-dà ! maître Deschesnaux. Faites bien attention : il y a des gens qui en savent plus long que d’autres, entendez-vous ? Je connais les intentions de M. l’intendant mieux que vous ; il me les a confiées, à moi qui suis un homme de confiance. Voici une lettre qui renferme ses ordres, et ses derniers mots sont ceux-ci :

« Michel Lavergne, — car il ne me traite pas de chien et de coquin comme le font certains individus pas plus messieurs que moi, — Michel, il faut que Deschesnaux conserve tous les égards possibles pour Mme Hocquart… Je vous char-