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MYSTÉRIEUX
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troupe des comédiens en qualité de musicienne, avait été rendue malade par le voyage, qu’elle avait besoin d’une bonne chambre pour se reposer, et que, d’ailleurs, elle appartenait à une famille distinguée, étant la proche parente du capitaine DuPlessis. Le domestique la conduisit dans la chambre de DuPlessis, en disant qu’à l’arrivée de celui-ci, qui était allé au-devant du gouverneur à Champlain, il verrait lui-même à faire donner à la dame les soins nécessaires.

Rendue dans la chambre, Mme Hocquart trouva sur une table ce qu’il fallait pour écrire. Il lui vint alors à l’esprit qu’elle pouvait écrire à son mari, qui ne devait pas tarder à arriver, et rester enfermée jusqu’à ce qu’elle eût reçu sa réponse. Pendant que Taillefer était sorti pour aller voir à son cheval, elle se mit en devoir d’avertir M. Hocquart de sa présence.

— Fidèle guide, dit-elle à Taillefer en le voyant rentrer, vous que le ciel m’a envoyé pour me secourir dans mes tribulations, je vous prie de porter ceci à M. l’intendant Hocquart, aussitôt qu’il sera arrivé. C’est le dernier service que vous rendrez à la malheureuse femme que vous avez sauvée de l’atteinte de ses persécuteurs. Remettez cette lettre à M. l’intendant, et surtout, ajouta-t-elle avec agitation, remarquez de quel air il la recevra.

Taillefer se chargea, sans hésiter, de la missive, et après avoir exigé que la pauvre femme prît quelque peu de la nourriture qu’il venait d’apporter, il sortit en lui recommandant de rester enfermée. Mais, dès qu’il se fut éloigné, il réfléchit à ce qu’il y avait de contradictoire dans sa conduite.

— Elle s’est enfuie du manoir de la Rivière-du-Loup, se disait-il, pour se soustraire aux mauvais traitements de Deschesnaux, son mari ; elle a refusé de retourner chez M. de la Touche, son père, comme c’était son devoir ;