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MYSTÉRIEUX
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reconnue publiquement. Elle me parle de cela comme si la marquise était prête à recevoir cette nouvelle avec le plaisir d’une mère qui apprend le mariage de son fils. Que dirait l’altière marquise si elle découvrait que l’ami auquel elle a laissé deviner son désir de le voir épouser sa nièce et sa protégée, sans qu’il fît rien pour paraître y être opposé, est déjà marié ? C’est alors que l’on verrait ce que peut la colère d’une femme influente. Cependant, Deschesnaux, il faut que Joséphine paraisse aux Trois-Rivières ; la marquise s’y attend, le gouverneur le veut. En vérité, le danger dont me menace mon horoscope, semble près de fondre sur moi.

— Le plus sûr moyen, dit Deschesnaux, serait de persuader à madame qu’elle doit feindre d’être pendant quelques instants la femme de votre humble serviteur.

— C’est impossible, Deschesnaux, elle ne voudra pas y consentir.

— Mais alors, M. l’intendant, ne pourrait-on pas chercher une personne pour jouer son rôle ?

— Vous oubliez encore que cette fausse dame Deschesnaux serait confrontée avec DuPlessis.

— On pourrait éloigner DuPlessis ; il y a mille moyens, pour un homme d’État, de faire disparaître un importun qui épie ses secrets.

— Cela serait inutile ou dangereux, car si le gouverneur ou la marquise avait un soupçon, et Bégon sera là pour leur en suggérer, on ferait venir le vieux seigneur de Champlain ou quelqu’un de sa maison.

— Dans ce cas, monsieur, je ne vois d’autre moyen qu’un voyage à la Rivière-du-Loup, entrepris par vous, pour demander à votre épouse, au nom de son affection, son consentement aux mesures que votre sûreté exige.

— Deschesnaux, j’ai honte de la presser de consentir à ce qui répugne à la noblesse de son