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Peut me rendre mon fils, et va vous rendre un père.

C'est moi qui vous en prie ; et dans mon tendre effroi,

Je cherche à vous fléchir, moins pour vous que pour moi.

J'oublierai tout enfin : dégagez ma promesse.

Il faut aujourd'hui même épouser la princesse ; [860]

Et si vous refusez ce noeud trop attendu,

J'en mourrai de douleur ; mais vous êtes perdu.

Dom Pedre

Connaissez votre fils, Seigneur : malgré son crime,

Il tient encor de vous un coeur trop magnanime.

Les plus affreux périls ne sauraient m'ébranler. [865]

Vous rougiriez pour moi, s'ils me faisaient trembler.

Je ne crains point la mort ; et ce que n'a pu faire

L'amour et le respect que je porte à mon père,

Les supplices tout prêts ne peuvent m'y forcer.

Voila mes sentiments ; vous pouvez prononcer. [870]

Alphonse

Eh ! Pourquoi conserver, en méritant ma haine,

Ce reste de respect qui ne sert qu'à ma peine !

Laisse-moi plutôt voir un fils dénaturé,

Un ennemi mortel contre moi conjuré,

Tout prêt à me percer d'un poignard parricide. [875]

Raffermi ma justice encore trop timide ;

Et quand tu me réduis enfin à le vouloir,

Laisse-moi te punir au moins sans désespoir.

Dom Pedre

J'ai mérité la mort.

Alphonse

Je t'offre encor la vie.

Dom Pedre

Que faut-il ?

Alphonse

Obéir. [880]

Dom Pedre

Elle m'est donc ravie. [880]