Peut me rendre mon fils, et va vous rendre un père.
C'est moi qui vous en prie ; et dans mon tendre effroi,
Je cherche à vous fléchir, moins pour vous que pour moi.
J'oublierai tout enfin : dégagez ma promesse.
Il faut aujourd'hui même épouser la princesse ; [860]
Et si vous refusez ce noeud trop attendu,
J'en mourrai de douleur ; mais vous êtes perdu.
Connaissez votre fils, Seigneur : malgré son crime,
Il tient encor de vous un coeur trop magnanime.
Les plus affreux périls ne sauraient m'ébranler. [865]
Vous rougiriez pour moi, s'ils me faisaient trembler.
Je ne crains point la mort ; et ce que n'a pu faire
L'amour et le respect que je porte à mon père,
Les supplices tout prêts ne peuvent m'y forcer.
Voila mes sentiments ; vous pouvez prononcer. [870]
Eh ! Pourquoi conserver, en méritant ma haine,
Ce reste de respect qui ne sert qu'à ma peine !
Laisse-moi plutôt voir un fils dénaturé,
Un ennemi mortel contre moi conjuré,
Tout prêt à me percer d'un poignard parricide. [875]
Raffermi ma justice encore trop timide ;
Et quand tu me réduis enfin à le vouloir,
Laisse-moi te punir au moins sans désespoir.
J'ai mérité la mort.
Je t'offre encor la vie.
Que faut-il ?
Obéir. [880]
Elle m'est donc ravie. [880]