Chasse loin de mon fils ce transport téméraire.
Je lui vais enlever l'objet de tous ses voeux ;
Fais qu'à ses feux éteints succèdent d'autres feux ; [590]
Qu'il perde son amour, en perdant l'espérance.
Protège, juste ciel, daigne aider ma prudence.
Scène III
Venez, venez, Inès. Peut-être attendez-vous,
Un rigoureux arrêt dicté par le courroux.
Vous jetez la discorde au sein de ma famille ; [595]
Contre le Portugal vous armez la Castille,
Et vos yeux, seul obstacle à ce que j'ai promis,
M'alarment plus ici qu'un peuple d'ennemis.
Je veux bien cependant ne pas croire, Madame,
Que d'un fils indiscret vous approuviez la flamme ; [600]
Ni qu'en entretenant ses transports furieux,
Vôtre coeur ait eu part au crime de vos yeux ;
Je ne punirai point des malheurs, que peut-être,
Malgré votre vertu vos charmes ont fait naître :
Quoiqu'il en soit enfin, je veux bien l'ignorer. [605]
Sans rien approfondir, il faut tout réparer.
Je l'ai bien crû, seigneur, d'un monarque équitable,
Qu'il ne se plairait pas à me croire coupable ;
Que lui-même plaignant l'état où je me vois,
Ne m'accablerait point...
Inès, écoutez moi. [610]
De vos nobles ayeux je garde la mémoire :
Du sceptre que je porte ils ont accru la gloire :