Page:Houdar de La Motte - Œuvres complètes, 1754, tome 4.djvu/337

Cette page n’a pas encore été corrigée

Eh ! Pourquoi, s'il l'aimait, ne le dire qu'à vous ?

Craignez en me trompant, d'attirer mon courroux.

Je le vois : ce n'est point la princesse qu'il aime.

Il vous parle de vous.

Inès

Ciel de moi !

La Reine

De vous-même.

Je vous crois son amante ; ou, pour m'en détromper, [145]

Montrez-moi donc le coeur que ma main doit frapper.

Car je veux bien ici vous découvrir mon âme ;

Celle qui de Dom Pedre entretiendrait la flamme,

Qui, me perçant le sein des plus sensibles coups,

À ma fille oserait disputer son époux, [150]

Victime dévouée à toute ma colère,

Verrait où peut aller le transport d'une mère.

Ma fille est tout pour moi, plaisir, honneur, repos ;

Je ne connais qu'en elle et les biens et les maux ;

Il n'est, pour la venger, nul frein qui me retienne ; [155]

Son affront est le mien ; sa rivale est la mienne ;

Et sa constance même à porter son malheur

D'une nouvelle rage armerait ma douleur.

Songez-y donc : sachez ce que le prince pense.

Il faut me découvrir l'objet de ma vengeance. [160]

Je brûle de savoir à qui j'en dois les coups.

Livrez-moi ce qu'il aime ; ou je m'en prends à vous.


Scène V

Inès