Page:Houdar de La Motte - Œuvres complètes, 1754, tome 4.djvu/336

Cette page n’a pas encore été corrigée


Scène IV

La Reine, Inès.
La Reine

Tandis qu'à mon époux j'adresse ici mes plaintes, [115]

Inès, vous entendez ses desseins et mes craintes ;

Et, si vous le vouliez, vous pourriez m'informer

Du mystère fatal dont je dois m'alarmer.

Vous avez de l'infant toute la confidence.

Je ne jouirais pas sans vous de sa présence. [120]

S'il honore ma cour, ses yeux toujours distraits,

Paraissent n'y chercher, n'y rencontrer qu'Inès.

De grâce éclaircissez de trop justes alarmes.

Ma fille à ses yeux seuls n'a-t-elle point de charmes ?

À ce coeur prévenu, quel funeste bandeau [125]

Cache ce que le ciel a formé de plus beau ?

Car quel objet jamais aussi digne de plaire

A mieux justifié tout l'orgueil d'une mère !

Les coeurs à son aspect partagent mes transports ;

La nature a pour elle épuisé ses trésors ; [130]

De cent dons précieux l'assemblage céleste,

De ses propres attraits l'oubli le plus modeste ;

La vertu la plus pure empreinte sur son front,

Me devraient-ils encor laisser craindre un affront !

Inès

Madame, croyez-vous le prince si sauvage [135]

Qu'il puisse à la beauté refuser son hommage ?

Jusques dans ses secrets je ne pénètre pas ;

Mais avec moi souvent admirant tant d'appas,

Et de tant de vertus reconnaissant l'empire,

Ce que vous en pensez, il aimait à le dire. [140]

La Reine