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Une modeste joie ajoute à sa beauté.

L'erreur la rend ensemble impie et généreuse : [1380]

Puissiez-vous vivre heureux comme je meurs heureuse,

Nous dit-elle ; et soumis à de plus saintes lois,

En quittant vos faux dieux, mériter de bons rois !

Puis avec un regard tout plein de sa tendresse,

À son nouvel époux cette amante s'adresse : [1385]

Que je bénis l'amour que tu m'as inspiré,

Puisqu'à ton dieu par-là mon coeur fut attiré !

Ma foi, pour l'un et l'autre, aujourd'hui se signale :

Ce bucher est pour moi la couche nuptiale ;

Et ce trône de flamme où je m'en vais monter, [1390]

Vaut mille fois celui que tu m'as fait quitter.

Dans ses derniers adieux vingt fois elle l'embrasse,

Et soudain au bucher vole prendre sa place.

Alors selon votre ordre on retient Misaël,

Qui, détournant les yeux du spectacle cruel, [1395]

Les fixe vers le ciel, qu'à genoux il implore

Pour cet objet chéri que la flamme dévore ;

Et des mains des bourreaux dès qu'il peut s'arracher,

Il s'élance lui-même au milieu du bucher,

Où des feux irrités la prompte violence [1400]

A bientôt par leur mort rempli votre vengeance.

Oui ; vous êtes vengé, seigneur, ils ont vêcu.

Antiochus

Je ne suis point vengé, grands dieux ! Je suis vaincu.

Salmonée

Oui, superbe, tu l'es ; et ton pouvoir t'échappe ;

Voilà le dernier coup dont le seigneur nous frape. [1405]

Le sang de mes enfants vient de le désarmer.

Ta rage contre nous a beau se ranimer,