Scène VIII
À Antigone.
Approche ; et que ton coeur frémissant à ma vue
Commence de subir la peine qui t'est due. [1085]
De tant d'amour, ingrate, est-ce donc là le prix ?
Devais-tu le payer d'un si sanglant mépris ?
Après mon sceptre offert, Antigone me brave,
Jusqu'à m'abandonner ; pour qui ? Pour un esclave !
Jusqu'à me préférer les rigueurs de son sort ; [1090]
À fuir mon trône enfin, comme il fuyait la mort !
Souffrez, Antiochus, que je me justifie ;
Non, que je prenne encor aucun soin de ma vie,
Que je prétende ici fléchir votre courroux ;
Mais pour mon propre honneur, pour moi, plus que pour vous. [1095]
De mon coeur dès longtemps Misaël est le maître ;
Je brûlais d'un amour que Sion a vu naître ;
Je le cachais toujours et n'en triomphais pas.
Quand le ciel de mon père ordonna le trépas,
Au sein de votre cour vous m'avez appelée. [1100]
De toutes vos faveurs votre amour m'a comblée.
Vos soins impatients prévenaient mes souhaits.
Je n'avais plus de coeur à rendre à vos bienfaits ;
Et je m'en suis tenue à la reconnoaissance
Que mon destin encor laissait en ma puissance. [1105]