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Dont l'aveu m'attira votre juste courroux,

Malgré tous mes combats redouble auprès de vous.

Par ce nouvel aveu je cherche à vous déplaire :

Je veux vous irriter, ou contre un téméraire, [565]

Ou contre un coeur toujours rebelle à vos appas,

Qui brûle de mourir pour ne vous aimer pas.

Antigone

Barbare, tu te perds, c'est tout ce qui m'offense ;

Et s'il en est besoin pour tenter ta constance,

Dans la vive douleur que je fais éclater, [570]

Vois tous les sentiments qui peuvent te flatter.

Misaël

Eh quoi, Madame, quoi ! ...

Antigone

Dans ton danger extrême

Je ne puis plus, ingrat, te cacher que je t'aime.

Misaël

Vous m'aimez. Ah ! Voilà le comble des malheurs !

Antigone

Je t'aime et tu gémis !

Misaël

Vous m'aimez et je meurs ! [575]

Ciel, qui vois les vertus dont tes mains l'ont ornée

Dans le sein de Juda que n'est-elle donc née ?

Si sous tes saintes lois elle eût reçu le jour,

Le bonheur de ma vie eût été son amour ;

Ou si tu permettais qu'une beauté si chère [580]

Perdît en t'adorant le titre d'étrangère ;

Que par toi réunis, on pût nous voir tous deux,

Aux pieds de tes autels te consacrer nos feux...

Hélas ! Vaine espérance où mes désirs s'égarent !

Pourquoi nous attendrir, quand tes lois nous séparent ! [585]

Antigone

Quoi ! Misaël, devant ces tyranniques lois,

La nature et l'amour perdent-ils tous leurs droits ?