Dont l'aveu m'attira votre juste courroux,
Malgré tous mes combats redouble auprès de vous.
Par ce nouvel aveu je cherche à vous déplaire :
Je veux vous irriter, ou contre un téméraire, [565]
Ou contre un coeur toujours rebelle à vos appas,
Qui brûle de mourir pour ne vous aimer pas.
Barbare, tu te perds, c'est tout ce qui m'offense ;
Et s'il en est besoin pour tenter ta constance,
Dans la vive douleur que je fais éclater, [570]
Vois tous les sentiments qui peuvent te flatter.
Eh quoi, Madame, quoi ! ...
Dans ton danger extrême
Je ne puis plus, ingrat, te cacher que je t'aime.
Vous m'aimez. Ah ! Voilà le comble des malheurs !
Je t'aime et tu gémis !
Vous m'aimez et je meurs ! [575]
Ciel, qui vois les vertus dont tes mains l'ont ornée
Dans le sein de Juda que n'est-elle donc née ?
Si sous tes saintes lois elle eût reçu le jour,
Le bonheur de ma vie eût été son amour ;
Ou si tu permettais qu'une beauté si chère [580]
Perdît en t'adorant le titre d'étrangère ;
Que par toi réunis, on pût nous voir tous deux,
Aux pieds de tes autels te consacrer nos feux...
Hélas ! Vaine espérance où mes désirs s'égarent !
Pourquoi nous attendrir, quand tes lois nous séparent ! [585]
Quoi ! Misaël, devant ces tyranniques lois,
La nature et l'amour perdent-ils tous leurs droits ?