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livre ii, satire ii.

aspect différent, bien que la chair de l’un vaille la chair de l’autre, soit ! Mais comment sens-tu que ce loup qui ouvre la bouche a été pris dans le Tibéris ou en mer, entre les ponts ou à l’embouchure du fleuve Toscan ? Insensé ! tu admires un mulet de trois livres qu’il faut servir en morceaux. C’est l’apparence qui t’entraîne, il me semble. Pourquoi ne pas aimer les grands loups ? c’est que la nature les a faits grands et les mulets petits. Un estomac à jeun dédaigne rarement des mets vulgaires. — « J’en voudrais voir un grand étendu dans un grand plat ! » crie une gueule digne des Harpyes rapaces. Ô vous, Austers, venez, et corrompez les mets de tels gloutons ! Après tout, le sanglier et le turbot frais sentent mauvais quand l’abondance de nourriture charge l’estomac malade, et qu’étant plein, il a besoin de radis et d’oseille acide.

Toute pauvreté n’a pas été écartée encore des repas royaux ; une place y a été gardée aux œufs