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livre ii, épitre i.

d’avouer qu’il leur faut oublier, étant vieux, ce qu’ils ont appris étant imberbes. Celui qui vante les vers Saliens de Numa, voulant paraître comprendre seul ce qu’il ignore comme moi, approuve et applaudit moins les génies ensevelis qu’il n’en veut aux nôtres et qu’il ne hait envieusement nous et nos œuvres. Si les Græcs avaient détesté de cette façon les choses nouvelles, comme nous, qu’y aurait-il aujourd’hui d’ancien ? Que posséderait, que lirait, de quoi se servirait le public ?

Quand la Græcia, ayant terminé ses guerres, commença à s’occuper de bagatelles et se laissa gâter par la bonne fortune, elle s’éprit, tantôt des athlètes, tantôt des chevaux ; elle aima les ouvriers du marbre, de l’ivoire ou de l’airain ; elle suspendit ses yeux et son esprit à des tableaux peints ; elle se plut aux joueurs de flûte, puis aux tragédiens. Comme une jeune enfant jouant sous la garde de sa nourrice, elle quitta, dans sa satiété,