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art poétique.

mot par le mot, ou si, en imitant, tu ne te jettes pas dans une impasse d’où la honte, ou la loi même de l’œuvre, ne permettra point que tu sortes.

Ne commence pas, comme autrefois ce poëte cyclique : — Je chante la fortune de Priamus et l’illustre guerre. — Que dira ensuite une bouche si grande ouverte, qui soit digne de cette promesse ? Les montagnes accouchent, et c’est une souris ridicule qui naît. Combien vaut mieux celui-ci qui ne s’efforce point sottement : — Dis-moi, Muse, l’homme qui, après la prise de Troja, connut les mœurs et les villes d’hommes nombreux. — Il ne fait point sortir la fumée du feu, mais bien la lumière de la fumée, afin de montrer plus tard d’éclatantes merveilles, Antiphatès et Scylla, Charybdis et le Cyclope. Il ne raconte pas le retour de Diomédès en commençant à la mort de Méléagrus, ni la guerre Trojane à partir de l’œuf des Jumeaux ; mais il court toujours à l’événement, il jette l’auditeur au milieu des choses, sans qu’elles soient